Deux grands ensembles géographiques
« La route de Balata monte à travers la forêt primitive de Martinique jusqu’au Morne -Rouge et au-delà vers les plateaux d’Ajoupa-Bouillon, du Lorrain et de Basse-Pointe (…). Pas un ne sait ni ne peut dire à quel moment, sur cette route, vous quittez en vrai le sud du pays, ses clartés sèches, ses plages apprivoisées, ses légèretés soucieuses, pour hanter la demeure de ce nord de lourdes pluies, parfois de brumes, où les fruits, châtaignes et abricots ou mangues térébinthes, sont pesants, et où l’on entend au loin les conteurs et les batteurs de tambour. »
Edouard Glissant, Philosophie de la Relation – Gallimard 2010
Grossièrement, en première approche, on peut lire les paysages de la Martinique en deux grands ensembles : un nord, un sud.
La diversité saute aux yeux en effet entre le nord de l’île et le sud :
Au nord :
- au nord des reliefs élevés, qui approchent les 1 400 m d’altitude ; des pentes raides entaillées de profondes ravines, certaines plongeant même en falaise dans la mer ; des nuages presque toujours accrochés aux sommets, nimbant les pentes hautes d’une humidité permanente, favorisant un couvert végétal forestier, tropical, dense et foisonnant, mais aussi des cultures exigeantes en eau comme le bananier ; un volcan actif avec la Pelée, laissant apparaître des roches basaltiques à nu ; des côtes pleines assez peu découpées, dessinant un ensemble plutôt massif ;
Au sud :
- au sud des reliefs beaucoup plus modestes, presque trois fois moins élevés, qui frisent au maximum les 500 m d’altitude (504 m pour la Montagne du Vauclin, 478 m au Morne Larcher), laissant moutonner des collines au pied des mornes et jusqu’à s’alanguir en plaines à l’ouest (fond de la baie de Fort-de-France), en salines, étangs et « savanes » à l’extrême sud de l’île ; des nuages moins accrochés, laissant découvertes des étendues plus ensoleillées, plus sèches, couvertes d’une végétation plus broussailleuse et moins arborée, sans exubérance végétale autre que celle des jardins créoles qui accompagnent les cases ; une agriculture où le bananier, malgré l’irrigation, cède plus souvent la place à la canne à sucre et à l’élevage ; des formations géologiques et pédologiques plus anciennes, sans volcan actif, mais avec des dépôts sédimentaires clairs qui s’intercalent avec les vieux basaltes ; des côtes beaucoup plus découpées et complexes, avec la presqu’île sud-ouest et celle de Sainte-Anne au sud, mais aussi des baies successives profondes et accueillantes, séparées par des caps et des pointes successifs et émaillées par endroits d’îles, d’îlots et de bancs de sables.