Les fondements naturels et humains des paysages

Introduction

« La part d’opacité aménagée entre l’autre et moi, mutuellement consentie (ce n’est pas un apartheid), agrandit sa liberté, confirme aussi mon libre choix, dans une relation de pur partage, où échange et découverte et respect sont infinis, comme allant de soi. (…) L’opacité accueille et recueille le mystère de l’évidence de toutes les poétiques, c’est-à-dire de tous les détails des lieux du monde, sans les offusquer jamais et sans tenter de les réduire à l’unité. (…) Pas un paysage   qui ne soit obscur, sous ses plaisantes transparences, quand vous lui parlez infiniment. »

Edouard Glissant, Philosophie de la Relation – Gallimard 2010

« Comme la mémoire collective a été raturée, les paysages ont été ravagés. Apprendre dans son existence à lire le paysage   ou à le fréquenter, c’est à mon sens apprendre à en raconter la suite, ou la poursuite : c’est se donner les moyens de recomposer cet autre continuum, celui de la biographie collective. Aujourd’hui, la lecture des paysages, tout autant que l’archéologie ou la numismatique, aide à comprendre les épisodes, les circonstances de la transformation des peuples et des communautés. (…) Lire le paysage  , c’est enfin estimer le temps. De même le déchiffrage (le contraire du défrichage) et la fréquentation des pays dans leur fragmentation nous permettent, par la reconstruction poétique, de vérifier comment les paysages n’ont jamais été des décors consentants, mais les éléments actifs et constitutifs des diverses poétiques mises en œuvre ou en expression par des individus ou par des communautés. »

Edouard Glissant, les entretiens de Bâton Rouge, Gallimard 2008

« La nature bienveillante a donné à ce pays un sol volcanique et fécond, un climat toujours tiède. Au cours d’une histoire déjà longue de trois siècles, l’on a défriché, cultivé, construit. Les paysages d’aujourd’hui sont la résultante de cet effort. Il y a eu action incessante de l’homme sur la nature et inversement. C’est pourquoi il n’apparaît pas tellement impossible ni absurde d’aller chercher l’âme d’un pays derrière le décor mouvant qu’il offre à nos regards. »

Eugène Revert, La Martinique, Étude géographique et humaine. Paris : Nouvelles Éditions latines, 1949

Les fondements naturels et humains permettent d’expliquer d’où vient la multiplicité étonnante des paysages Martiniquais. Il s’agit d’une compréhension en profondeur du cadre de vie, qui trouve ses origines dans des dispositions naturelles et humaines. C’est bien la relation des hommes à leur environnement qui a constitué cette multiplicité de paysages, et c’est elle que l’on cherche à décrypter dans ces pages. Le territoire, écrit A. Magnaghi, auteur du « projet local », est une œuvre d’art, peut-être la plus belle, la plus collective que l’humanité ait réalisée. Il est le fruit d’un acte d’amour : il naît de la fécondation de la nature par la culture.
Pour décrypter cette relation « amoureuse », huit chapitres se succèdent :

1. Les paysages et la géologie
2. Les paysages et les reliefs
3. Les paysages et les sols
4. Les paysages et le climat
5. Les paysages et l’eau
6. Les paysages, la végétation et les milieux naturels
7. Les paysages et l’agriculture
8. Les paysages, l’urbanisation et les infrastructures