Des vues généreuses et des paysages sensibles

Ouverture sur le grand paysage de la Pelée avec canne à sucre et pâturages au premier plan. Pentes du Carbet

Le rôle majeur des reliefs dans la diversité contrastée des paysages Martiniquais est enrichi par l’amplitude et la générosité des vues offertes. Depuis les sommets habités des mornes du sud, des vues spectaculaires s’ouvrent sur l’étroit linéaire des crêtes, mais aussi sur les pentes boisées et cultivées, et jusqu’aux plaines littorales, aux côtes et à la mer. Des vues plus vastes encore s’ouvrent des pentes des Pitons et de la Pelée, s’étendant de la Dominique à Sainte-Lucie, et parfois même, par temps clair, jusqu’à Saint-Vincent. Mais elles sont souvent masquées par la présence des nuages et par la densité de la forêt, offrant des ambiances plus mystérieuses et plus intimes. En revanche la puissance des entailles formées par les rivières sur les flancs dégage de larges horizons, des paysages de vallées profondes débouchant sur la mer ; en altitude, ces canyons délimitent des crêtes resserrées. Dans « la Martinique », Revert évoque à quel point « de tels contrastes donnent plus d’une fois l’impression de la grande montagne » : « Tous ceux qui ont couru la Pelée connaissent cette arête étroite qu’on appelle le Dos d’Âne et qui sépare la haute Falaise ou Filasse des ravines qui dévalent vers la rivière des Pères. De part et d’autre, des à pic de trois à quatre cents mètres, un vent violent qui soufflette le visage, une brume épaisse et glaciale qui s’entr’ouvre par moments sur le vert incroyablement tendre du bas pays… »

Au nord la rivière du Lorrain est une des plus grandes entailles ; au sud, la rivière Pilote parvient à créer un monde en creux au sein des pentes puissantes des mornes du sud.

D’en haut, partout s’impose le bleu de la mer à l’horizon, du fait de l’étroitesse de l’île. Inversement, depuis les points bas de l’île, la force des pentes s’impose dans le paysage  , barrant l’horizon et affichant de façon très lisible l’occupation des sols.

Les pentes urbanisées de Fort-de-France, vues depuis le centre-ville (espace Perrinon)

La RN1 en sortie du Lamentin ; ouverture sur les pentes de Morne Pavillon

Au final, qu’ils soient vus d’en haut ou vus d’en bas, les paysages de la Martinique apparaissent sensibles, fragiles, très exposés à la vue, pour le meilleur et pour le pire. A ce titre, les pentes construites de Fort-de-France sont révélées par la rocade qui y passe sans vergogne, en force, par monts et par vaux. Elle révèle des pans d’urbanisation plutôt médiocre, violente et anarchique, écrasant quelque peu les reliefs, mais découvre également de spectaculaires paysages urbains, jusqu’au point d’orgue du quartier Trenelle, aux pentes raides entièrement couvertes de cases, soigneusement agencées les unes aux autres sans qu’un mètre carré ne soit « perdu ».